Wherever Seeds May Fall (2021) Peter Cawdron est une variation intéressante sur thème du premier contact. L'auteur, qui publie pas mal de façon indépendante, est coutumier du thème, puisqu'en dix ans, il a publié plus de dix romans qui l'explorent. Pour dire les choses simplement : ce n'est pas mal du tout, et je vais sans doute aller jeter un œil à ses autres bouquins. Finalement, la plus grande faiblesse de Wherever Seeds May Fall, c'est sans doute de devoir vivre dans l'ombre de Liu Cixin et de sa trilogie du Problème à trois corps, qui examine les mêmes idées (l'hypothèse de la forêt sombre) avec une virtuosité difficilement égalable. Le roman de Peter Cawdron en est d'ailleurs inspiré, il le dit lui-même.
Une comète arrive dans le système solaire, mais elle a l’étrange habitude de ricocher sur les géantes gazeuses pour décélérer... Voilà qui n'est pas très naturel. On suit surtout deux personnages qui se retrouvent conseillers du président des USA, l'un représentant la perspective militaire, et l'autre, la perspective scientifique. Viennent s'ajouter deux autres points de vue : celui d'Andy, streamer indépendant de la droite américaine et ersatz d'Alex Jones, et celui d'un pêcheur mexicain. Si le premier est tout à fait pertinent et permet de se pencher sur le complotisme et les problèmes de communication autour des faits scientifiques, le second est plus... superflu : il prend pas mal de pages pour, on le comprend rapidement, servir de perspective subjective à un évènement qui n'avait pas particulièrement besoin de cette perspective.
C'est d'ailleurs un fait récurrent : ce roman m'a particulièrement fait réaliser à quel point je suis impitoyable envers la narration que je juge superflue. Par exemple, une fois que je comprends à quoi sert la perspective de ce pêcheur, je lis les chapitres qui le concernent en diagonale, car c'est comme si j'avais de l'avance sur la narration : je sais où elle va et le chemin pour y arriver n'a rien de captivant en soi. Même chose avec la scène finale, le sauvetage dans l'espace : je sais à l'avance que les personnages vont retourner sur Terre à peu près vivant, et je me fous des détails, ce n'est pas comme si je n'avais jamais lu/vu des dizaines de scènes similaires.
Malgré quelques faiblesses, donc, le récit m'a tout à fait intéressé. Il y quelques retournements de situations bien pensés, notamment quand les personnages se rendent compte que le "vaisseau" alien compte utiliser la Terre de la même façon que les géantes gazeuses, c'est-à-dire comme un amortisseur pour ralentir, avant d'utiliser Venus similairement, pour ensuite revenir vers la Terre qui, par sa rotation autour du soleil, sera à nouveau dans une position abordable. (J'aime aussi l’hypothèse de l'alien n'étant qu'une sonde automatique, comme celles envoyées dans l'espace par les humains.) Et bien qu'elle ne soit pas hautement originale, la révélation finale est aussi parvenue à être une vraie surprise, notamment parce qu'elle va à l'encontre de l’idéalisme scientifique professé par l'un des deux personnages principaux et, finalement, en un sens, confirme la position des complotistes. Or, le lecteur de ce genre de ce genre de littérature se range certainement du côté de la science contre les complotistes, cette pirouette a donc un petit côté méta. Par contre, cette révélation finale est narrativement mal exploitée : les aliens se révèlent soudainement être une menace, mais l'auteur commet le pécher d'expliquer au lieu de montrer. En gros, les personnages expliquent la menace, mais cette menace n'est jamais concrétisée par des actions. Dommage.
Je suis donc un peu sévère envers Wherever Seeds May Fall, mais au final, j'ai l'intention de lire d'autres romans de l'auteur, et peut-être même la suite de celui-ci quand elle paraitra, ce qui est un grand compliment. Les quelques faiblesses sont pardonnables tant ça se lit bien, et on retient surtout les bonnes idées.