I thought then, and still think, that the momentum of the global civilisation we have built is unstoppable, and that its conclusion will be either its own collapse, the destruction of most life on Earth or the refashioning of Earth entirely in the image and interests of modern human beings. Either way, the oil tanker is not turning around now, despite the heroic efforts of many. ‘The best intentions in the world’, wrote Snyder to Berry, ‘will not stop the inertia of a heavy civilisation that is rolling on its way.’ That was in 1977.
De Paul Kingsnorth, j'ai lu il y a quelques temps l'article Dark Ecology, qui est inclus dans ce recueil. Confessions of a recovering environmentalist (2017) n'est pas pour moi un livre facile à commenter. Parce que c'est une suite d'articles, certes, mais surtout parce que le sujet principal est le problème de la civilisation. L’inexorabilité du désastre et le mythe du progrès. C'est bien écrit, globalement pertinent et ça ne tourne pas en rond malgré les liens évidents entre les articles. Pourtant, il ressort de tout ça une forte impression de confusion, parce qu'il n'y a pas de solution crédible aux problèmes évoqués, et c'est bien le propos. J'ai énormément pensé à ma propre expérience. Par exemple, je vis à Bordeaux depuis pas mal d'années, une ville dynamique, comme on dit, et quand je me balade, je suis horrifié par la frénésie de construction. Des grues, du bruit, des travaux, d'ignobles et gigantesques blocs de béton qui s'élèvent. Puis quand un quartier est envahi par des bâtiments neufs et modernes, on passe au quartier suivant, on ajoute encore, on élève, on bâtit. Vraiment, ce spectacle éveille en moi une horreur existentielle : la croissance aveugle, cancéreuse, dévorante ; une force sans conscience et sans but, qui avance et avance encore, probablement vers un précipice. Et en même temps, je ne nie pas la valeur du progrès, de la prospérité : j'ai visité d'autres villes où la moitié des commerces étaient fermés et délabrés. Sans doute, ce n'est pas mieux. Alors je suis comme bloqué, piégé, je ne crois plus au progrès, plus du tout, du moins pas en ce progrès débridé et aveugle, mais je n'ai rien à mettre à la place, je n'ai pas de foi civilisationnelle. Je suis horrifié par le gigantisme, mais je crains qu'il soit inéluctable.
Comme il se doit, Kingsnorth critique les techno-utopistes, qui oublient que la majorité de la « prospérité » est offerte gratuitement, mais pas perpétuellement, par la biosphère : l'air, la terre, l'océan, les rivières, les ressources fossiles... Ils accusent les critiques du progrès de fantasmer sur le passé, mais eux-mêmes fantasment sur l'avenir, attitude encore plus proche de la foi, car l'avenir, contrairement au passé, se prête à tous les rêves. Kingsnorth évoque l'échec des environnementalistes, qui trop souvent se concentrent sur le carbone et plongent dans le mythe réconfortant de la croissance verte. Il évoque l'échec de l'utopie multiculturaliste, qui avec l'économie globalisée contribue à détruire tout sentiment d'appartenance, tout lien à la terre, avec l’environnement. Comme si les êtres humains pouvaient se satisfaire d'être des atomes décentralisés, livrés à la gravité volage d'un marché mondial. Enfin, qui sait ? Peut-être qu'ils le peuvent : je n'ai pas percé le code instable de la nature humaine.
A nation is a story that a people chooses to tell about itself, and at its heart is a stumbling but deep-felt need for those people to be connected to the place they live and to each other. Humans in all times and places have needed ancestors, history, a place to be and a sense of who they are as a collective, and modernity and rationalism have not abolished these needs. They are needs that stimulate great passions, which in turn can do great harm, as history has shown time and again, but they are unlikely ever to go away.[...]Je pense à Lovecraft, qui fuit le chaos de New York pour revenir à la familiarité de Providence. Je comprends son sentiment, je suis certain que beaucoup de gens le comprennent plus ou moins consciemment, mais la plupart d'entre nous n'ont pas de Providence où revenir.
If an identity is an alliance between people and places, then airport-lounge modernity means taking the places out of the picture. All that is left is people who could be anywhere: citizens of nowhere, consumers of objects and experiences, connected by their little screens, the same white light shining into their faces from Doncaster to Dubai.
Large-scale immigration is not, as some of its more foaming opponents believe, a conspiracy by metropolitan liberals to destroy English identity. It is a simple commercial calculation. It may cause overcrowding and cultural tension; it may be economically traumatic for some people, and it may drain poorer countries of their own talent, but it is undoubtedly good for growth, which is why ‘business leaders’ consistently call for more of it. Immigrants are easier to exploit and underpay, and often prepared to work harder and accept fewer rights. If you believe, as our politicians apparently do, that what’s good for business is good for everyone, and that a nation is little more than a machine for competing in a ‘global race’, then mass immigration is an entirely sensible proposition. [...]Kingsnorth, comme moi, s'est beaucoup nourri de science-fiction pendant son enfance, mais le choc du réel a balayé toutes ces potentialités. Oh, pas totalement : qui sait ce qui peut arriver sur le long terme ? Tout peut arriver. Pourtant, pour le siècle à venir, il n'y a pas grand chose d'autre que la perspective d'une croissance quantitative (plus d'humains, plus d'industrie, plus de destruction) couplée à un déclin global, un désastre environnemental : bref, la certitude de l'effondrement, d'un recul du niveau de vie, de guerres de l'eau, de vagues toujours plus massives d'immigration, causées par le changement climatique, qui ne manqueront pas d'éroder ce qu'il reste des démocraties occidentales en invoquant des réations de repli. La ligne est fine entre lucidité et catastrophisme. J'essaie de me méfier du catastrophisme, car je sais qu'il peut être tristement réconfortant : imaginer le monde brûler, c'est se libérer de la complexité écrasante du réel et de ses propres échecs, car, finalement, rien n'importerait. Il y a aussi le poids de la culpabilité individuelle, la quasi-impossibilité de ne pas être un rouage dans le système que l'on critique. Le plus simple, bien sûr, c'est de ne pas y songer et de se faire son terrier.
Sometimes, when I look at history, I think that identity is the root of all evil. Sometimes, when I look at the present, I think that we will be lost without it.
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