mardi 12 septembre 2017
La cité et les astres - Arthur C. Clarke
Dans pas moins d'un milliard d'années, les derniers humains vivent dans une unique cité technologiste. Une utopie qui leur accorde la satisfaction instantanée de tous leurs besoins physiques, mais une utopie figée. Les enfants ne naissent plus, toute possibilité de changement a disparu, et il est impossible à quiconque de quitter la cité mère qu'est Diaspar. Les humains vivent des milliers d'années, puis replongent dans le grand tout de l'éternité électronique pour quelques dizaines de millénaires, et renaissent ensuite au monde en récupérant la mémoire de leurs vies passées. Mais voilà qu'apparait un jour Alvin, un être neuf, original, qui vit sa première incarnation. Contrairement à ses compatriotes, il ressent l'appel de l'inconnu et se lance dans une quête initiatique à la structure tout ce qu'il y a de plus classique. Appel de l'aventure, aide du mentor, découverte d'un nouveau monde, rencontre avec la mort, appropriation d'un objet aux propriétés curatives, chemin du retour et changement appliqué au monde du début.
Cette structure d'une efficacité éternelle fonctionne toujours aussi bien quand elle est utilisée par un auteur de talent. Le principal problème du roman, c'est ce que découvre Alvin en dehors de Diaspar : une communauté d'humains télépathes, à la fois technologistes et vivant en harmonie avec la nature. Dans la ville qu'est Diaspar, la stagnation de l'humanité sur une échelle de temps colossale (un milliard d'années) fait sens : la cité a été créé dans ce but, et une science d'une invraisemblable puissance s'emploie à maintenir le statu quo. Mais les gens vivant hors de Diaspar n'ont pas de telles barrières. Comment, au fil des millions d'années, n'ont-ils pas eu envie de reconquérir le désert qui recouvre la Terre ? D'aller toujours plus loin, explorer derrières les montagnes, puis derrière les étoiles ? C'est une faille logique assez problématique.
Mais à part ça, La cité et les astres reste de l'excellente SF qui voit loin et large. On ressent à accompagner Alvin le véritable souffle de la découverte. Son objectif est tout simplement de découvrir autrui, de découvrir d'autres formes d'intelligence, humaines ou non. Et son voyage l'amène à explorer un univers où l'homme n'est que peu de choses. Un univers qui autrefois débordait de vie, mais qui n'est plus que l'ombre de lui-même. On pense inévitablement à la Culture de Iain Banks, sur qui Clarke a dû avoir beaucoup d'influence, pour deux raisons. Cette vision d'un futur envisageant l'économie de l'abondance, un futur où la matière est maitrisée, et l'homme n'a plus guère à lutter pour vivre. Mais aussi cette idée d'une inévitable évolution vers d'autres formes de vie supérieures, intangibles, évolution appelée chez Banks Sublimation. Clarke est encore une fois d'un optimisme presque naïf. Il n'y a jamais vraiment de danger, de tension, sinon celle de la soif de connaissance. Quand un personnage s'exclame « nous sommes en temps de crise », on sourit, tant cette crise est légère et inoffensive. On sourit aussi quand Clarke parle d'amour, tant le sujet, littérairement du moins, n'est pas son point fort. Mais dans l'ensemble, cette SF paisible et optimiste, se reposant sur la curiosité envers l'immensité du temps et de l'espace, est un plaisir délicat.
348 pages, 1956, Folio SF
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