mercredi 11 mars 2020

Les titans du ciel - Théo Varlet & Octave Joncquel (L'épopée martienne 1)

Les titans du ciel - Théo Varlet & Octave Joncquel (L'épopée martienne 1)

Difficile de savoir par où commencer en parlant des Titans du ciel (1921), tant ce premier tome d'un duo de roman de Théo Varlet et Octave Joncquel est incroyablement riche et flamboyant. Impossible de séparer le roman de son contexte : quelques années après la Grande Guerre. Ainsi la civilisation apparait comme une chose fragile qui peut s’effondrer à tout moment, mais j'en parlais déjà il y a peu à propos de La mort du fer de S.S. Held. Tout commence par une petite leçon d'histoire : l'humanité semble avoir appris de ses erreurs et est parvenue à façonner une utopie globale et pacifique menée par la glorieuse France. Mais les humains sont devenus ni naïfs que quand ils entrent en contact avec les joviens et les martiens, ils envoient toutes les informations possibles aux extraterrestres et répondent à toutes leurs questions sans soupçonner le moindre mal. Les joviens, en effet, sont des parangons de vertu ; en revanche, les martiens ont des instincts un peu plus belliqueux...

Les vils martiens envoient donc vers la planète bleue des obus spatiaux qui dévastent les grandes villes. Le narrateur ne manque pas d'être plongé en plein dans la catastrophe, puis, grâce à un heureux hasard, il se retrouve ministre de la propagande du gouvernement qui essaie de se reconstruire en province. Il a donc une bonne excuse pour être au cœur des événements : et des évènements, il y en a ! Par l'échelle des destructions et les nombreuses scènes d'action cataclysmiques, Les titans du ciel rappelle les films catastrophes modernes. Mais, comme souvent dans de genre de littérature, ce ne sont pas tant les aliens que les humains eux-mêmes qui causent le chaos. Ici, le retour aux instincts ataviques est brutal, rapide jusqu'au grotesque. Les anarchistes menacent (et on a l'impression que les auteurs ne comprennent pas vraiment ce qu'est l'anarchisme) et les communistes prennent le pouvoir un peu partout : leur première mesure est d'ailleurs de forcer toutes les femmes entre 18 et 35 ans à un service sexuel obligatoire. Les auteurs pensent-ils vraiment que c'est la principale caractéristique du communisme ?! En conséquence, la copine du narrateur devra se déguiser en homme pour échapper aux communistes violeurs, ce qui ne l'empêchera pas de subir des avances féminines lors de péripéties invraisemblables.

Et tout cela est écrit avec une plume lyrique qui, conjuguée à ce rythme extrême et cette accumulation d'idées bizarres, est extrêmement réjouissante. Plus on approche de la fin, plus les enjeux grimpent. Les joviens finissent enfin par venir en aide à l'humanité et ils détruisent mars dans une scène brillante dont l'ampleur n'a pas grand chose à envier à la meilleure SF moderne. Mais les martiens parviennent tout de même à envoyer sur la terre quelques-uns des leurs, des prêtres, et là, le roman se transforme carrément en horreur cosmique. Il est révélé que les martiens qui mourraient se réincarnaient sur terre, en humains ; or, maintenant que presque tous les martiens ont été éliminés par les joviens, les prêtres envoyés organisent des cérémonies pour que les martiens morts puissent prendre possession des humains survivants. Ainsi, à la fin de ce premier tome, on dit adieu au narrateur alors qu'il lutte contre un esprit martien tentant de de posséder...

Les titans du ciel est une petite merveille : un déchainement d'inventivité qui accroche tant sur le plan romanesque que par son sense of wonder et la qualité de l'écriture. Je suis curieux de lire la suite, L'agonie de la Terre.

L'avis de TmbM.

1 commentaire:

  1. Oui, c'est vrai, ce roman catastrophe nationaliste avec son improbable mouvement rituel de cannibalisme et de sacrifices humains… J'adore !

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