samedi 18 juin 2016

Vernon Subutex 1 - Virginie Despentes


Vernon Subutex 1 - Virginie Despentes poche

D'habitude, j'ai la flemme d'essayer de naviguer dans le torrent sans fin des nouveautés littéraires. Mais celui-là, je l'ai trouvé dans une boite à livre, n'attendant que moi. Ayant déjà été intrigué par l'identité visuelle de ce bouquin en librairie, hop, c'est parti, un peu de littérature ultra contemporaine. Première chose : mais qu'est ce que c'est que cette quatrième de couverture ? Franchement ?

Qui est Vernon Subutex ?
Une légende urbaine.
Un ange déchu. 
Un disparu qui ne cesse de ressurgir. 
Le détenteur d'un secret. 
Le dernier témoin d'un monde révolu. 
L'ultime visage de notre comédie inhumaine. 
Notre fantôme à tous.  
 
Alors là, dans le genre synopsis improbable, c'est fort. Vernon est un ancien disquaire qui se retrouve à la rue et va squatter chez diverses connaissances. Ce n'est pourtant pas compliqué à expliquer. Enfin, ça serait peut-être moins efficace pour charmer l'acheteur potentiel que ce charabia.

Au début, j'étais un peu sceptique. Une écriture qui oublie les virgules pour faire moderne, trois ou quatre références culturelles par page pour être sur que le lecteur puisse s'identifier... Mais mon scepticisme s'est rapidement évanouit. Avant de se transformer en pur plaisir de lecture. Puis en admiration devant la maitrise de Despentes. Déjà, le roman ne prend pas son lecteur pour un abruti. On saute de personnage en personnage, Vernon servant de lien entre eux. Et cette polyphonie est juste un régal, un délice. De la star du porno au mari violent, du trader cocaïnomane à la mère qui ne s'est jamais remise de la mort de son fils, du producteur de cinéma au jeune con d’extrême droite, on en voit de toutes les couleurs. On passe quinze, vingt pages sur un personnage avant de sauter à un autre, les liens apparaissent progressivement, et cette trame de fond qui permet de lier toutes ces personnalités sait rester minimale et ne parait jamais artificielle. L’écriture change parfois subtilement pour s'adapter à l'identité qu'elle décrit, et tout semble si vrai, si juste, que c'est est troublant. C'est un peu sexe, drogue et rock’n’roll, mais version quarantenaire dépressif. C'est souvent vulgaire, mais jamais gratuit. On a juste l'impression que c'est réaliste. Despentes n'hésite pas à multiplier les ellipses, et encore une fois c'est un plaisir de s'y retrouver sans avoir impression de se faire tenir la main. Je ne peux que critiquer les dernières pages de ce premier tome, où Despentes insiste sur le coté polyphonique de son roman avec la subtilité d'une tronçonneuse, mais bon, c'est chipoter. Bref, c'est un roman dans lequel je me suis lancé en aveugle, sans avoir aucune attente particulière, et j'en ressors admiratif. Il y a là une vraie vision, la littérature en tant que miroir de la vie permettant de la contempler à distance tout en y étant plongé. Je crois que j'ai envie de lire la suite maintenant.

429 pages, 2015, le livre de poche

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