J'avais déjà lu et (étonnamment) apprécié Berlin : Check-Point Charlie (SAS 29) de Gérard de Villiers : pour du roman souvent qualifié de gare, c'était franchement bien écrit et surtout hautement crédible et captivant sur le plan géopolitique et historique. J'avais dû essayer d'en lire au moins un autre (on en trouve aisément dans les boites à livres) mais la recette n'avait pas su me reconquérir.
Je me suis cependant lancé dans Mission Sarajevo (SAS 109) à cause de mon intérêt pour la guerre de Yougoslavie : j'avais lu quelques livres à ce sujet au cours de mes voyages en Europe de l'Est. J'ai eu l'occasion d'arpenter les rues des villes qui sont à l'honneur dans ce récit : Zagreb, Split, Mostar, et bien sûr Sarajevo, qui, quand j'y étais de passage, portait encore en abondance les cicatrices de la guerre. Nous avions également pu deviner les cicatrices culturelles, les tensions ethniques et religieuses couvant toujours dans les Balkans.
La scène d'introduction est excellente, présentant avec efficacité le contexte et la violence effroyable qui peut y régner. La trame qui se développe par la suite est fonctionnelle, mais sans grand intérêt. On y voit notre héro Malko courir à droite et à gauche à Sarajevo, aux trousses d'une douzaine de stingers américains possédés par une milice musulmane sous l'influence des iraniens. C'est surtout l'occasion de découvrir Sarajevo pendant le siège, et sur ce plan, c'est une réussite. Je cède la parole au journaliste Renaud Girard à ce propos :
« Gérard, qui avait été transporté par notre reportage, me contacta dès mon retour à Paris : "Ma prochaine histoire se passera à Sarajevo !". Et il m'emprunta toutes mes cartes d'état-major de la ville et de la région. Son ouvrage, Mission Sarajevo, le numéro 109 de la collection des SAS, demeure un livre de référence sur l'ambiance de la capitale bosniaque au début de son siège. »
Les journalistes et espions entassés à l'hotel Holyday Inn, les dangers de Sniper's Alley, les milices aux allégeances variées, les chefs de guerre improvisés, les haines ethniques, les combines pour arracher des dollars ou des munitions, la « stratégie du pire » des islamistes qui consiste à pourrir la vie de tout le monde car la misère favorise la religiosité, les contre-snipers pour lutter contre les snipers, les forces de l'ONU impuissantes, les longues escortes jusqu'à l'aéroport... Même à propos des multiples femmes qui défilent dans la chambre d'hôtel de Malko : elles s'intéressent moins à lui qu'au fait qu'il a de l'eau chaude, chose rare dans le Sarajevo assiégé, et elles viennent le voir avant tout pour se doucher !
Mon exemplaire a été imprimé en janvier 1993. Sachant que le siège de Sarajevo a commencé en avril 1992, c'est un délai incroyablement faible entre le début d'un évènement historique et la publication d'un roman qui l'évoque d'une façon crédible et renseignée. Un mot rapide sur les femmes dans ce/ces romans : elles sont bien entendu 100% objectifiées et sexualisées, au service du plaisir de Malko (et d'une partie du lectorat), mais en même temps, ce sont des électrons libres qui font ce qui leur chante et ne manquent pas de compétence, presque des modèles de « femmes fortes » selon une certaine perspective moderne.
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