Entangled Life (2020) de Merlin Sheldraken est un bouquin sur les mycéliums, fungi, mycètes, champignons, etc. Sujet hautement passionnant, handicapé ici par une écriture bavarde et fourre-tout. L'auteur, fils d'intellectuel, qui enfant se faisait garder par l'ami de la famille Terence McKenna à Hawaï, est un peu pénible. Quoi qu'il en soit, il y a de quoi captiver et donner envie de s'intéresser aux champignons.
Les champignons tels qu'ont les connait sont le plus souvent les "fruits" du mycélium qui étend son réseau dans le terre. C'est le cas par exemple des truffes, "fruits" qui eux restent souterrains et dont l'odeur précieuse est une stratégie reproductive : les truffes attirent les animaux avec leur odeur ayant évoluée pour être irrésistible. Un animal déterre la truffe, la mange, et les spores se dispersent. Mais la majorité des mycètes dispersent leurs spores sans produire de "fruits". Certains mycéliums se nourrissent eux-mêmes d'animaux, les nématodes, de minuscules vers. Le mycélium est à la fois une entité et un réseau capable de prendre des "décisions". Il est capable de concentrer ses efforts sur une ressource (un bout de bois par exemple) en se développant dans la bonne direction. Le mycélium transmet des informations peut-être de façon électrique ou chimique et serait capable de maintenir une mémoire directionnelle
Il y a une analogie à faire avec la sélection naturelle : le mycélium se déplaçant souvent de façon concentrique à partir d'un même point, certains filaments (ou liens) trouvent un certains succès (ressources) et sont renforcés alors que d'autres échouent et s'effacent au profit des gagnants qui grandissent en "autoroutes".
Le lichen est une forme de vie captivante : il s'agit d'une relation symbiotique entre champignons et algues, mais aussi toutes sortes d'autres organismes de type bactéries. Les lichens "minent" les minéraux présents dans la roche, ainsi ils sont toujours les premiers venus dans un environnement stérile : il extraient ces premiers minéraux autrement inaccessibles et en mourant ils forment une terre primitive qui permet a des organismes plus complexes de coloniser leurs cadavres. Les lichens sont particulièrement résistants et quelques espèces peuvent, dans une certaine mesure, survivre dans l'espace.
L'auteur parle beaucoup des effets psychotropes de certaines substances venues des champignons, particulièrement la psilocybine, qui semble offrir des vertus presque trop belles pour être vraies.
Les champignons mycorhiziens sont ceux qui rôdent partout dans les sols et entretiennent des relations symbiotiques avec quasiment toutes les plantes. Les mycéliums peut subvenir à quasiment la totalité des besoins en nitrogène et en phosphore de certaines plantes. Ils transmettent aussi de l'eau. En échange, les plantes leur transmettent jusqu'à 30% du carbone qu'elles extraient de l’atmosphère. Ces relations, en fonction des espèces et des lieux, sont extrêmement variables. Si elles semblent le plus souvent bénéficier aux diverses espèces en relation, elles ne sont pas intrinsèquement bénéfiques et peuvent par exemple transmettre des substances nocives à certaines plantes. Quoi qu'il en soit, l'importance de cette relation est considérable : les plantes se développent différemment en fonction du fungi qui occupe ou non leurs sols. Les plantes aromatiques changent d'arôme, les fruits changent de goût, deviennent plus ou moins sucrés, etc. L'agriculture intensive a bien sûr une influence dévastatrice sur la richesse des sols et le rôle du mycélium dégradé est remplacé par les fertilisants chimiques. Par exemple, dans une étude : 27 espèces de mycélium "très connectées" dans une culture bio contre 0 dans une culture classique.
Les racines des plantes sont donc en relation constance avec le mycélium, au point qu'elles en sont envahies. Ces "hyphes fongiques" sont littéralement entremêlées aux cellules des racines. Ces hyphes sont cinquante fois plus fines que les plus fines des racines et peuvent être 100 fois plus longues. D'une certaine façon, elles sont les racines des racines. Il y a une logique général dans ces échanges souterrains qui fait penser à l'une de lois de la thermodynamique : l'énergie passe du concentré au diffus, c'est-à-dire que les nutriments vont globalement de là où il y en a abondance vers là où il en manque. Il s'agit de ne pas faire d’anthropocentrisme et de ne pas voir là un "altruisme". D'ailleurs, certaines plantes semblent s'être débarrassées de la photosynthèse pour ne plus tirer leur énergie que du réseau fongique, apparemment sans rien donner en échange. D'autres, comme les orchidées, semblent agir ainsi pendant une partie de leur avant de "rendre" plus tard.
Il ressort de l'examen de tout ces réseaux une vision de la vie comme processus et comme relation entre entités. Par exemple, nous autres humains avons en nous plus de microbes que de cellules. De ce point de vue, nous sommes comme les autres formes de vie des écosystèmes, des écologies, où il est difficile de savoir où se trouvent les frontières entre "soi" et les organismes avec lesquels nous avons des relations symbiotiques. La biologie, l'étude des organismes, devient l'écologie, l'étude des relations entre organismes.
Et, bien entendu, la vaste majorité des millions d'espèces de mycètes reste inconnues.
A propos de champignons,en dehors de cette chronique intéressante, le dernier Sanchez Piñol Fungus,le roi des Pyrénées est paru..une allégorie du pouvoir avec la rencontre avec un champignon géant. Ça promet!
RépondreSupprimerOui, j'ai vu passer ça ! J'ai vu aussi passer des critiques anglophones négatives, mais qui sait, on verra. J'ai beaucoup aimé Pandore au Congo.
Supprimerj’ai vu aussi passer quelques critiques négatives sur les blogs espagnols. On verra bien. On lui reproche de reprendre des formules de ses romans antérieurs.
RépondreSupprimerPandore au Congo était très bien.