mercredi 10 juillet 2019

A wrinkle in the skin - John Christopher

A wrinkle in the skin - John Christopher

A la manière des excellents Terre brulée (The death of grass, 1956) du même auteur et The day of the Triffids de John Wyndham, A wrinkle in the skin (1965) est un roman apocalyptique assez radical. Cette fois, la terre est ravagée par des tremblements de terre d'une puissance jamais vue. On se s'attarde pas sur le fond scientifique, ce qui compte, ce sont les conséquences sur le monde et les sociétés humaines. Commençons par le côté le plus primaire de ce genre de récits catastrophes : la jouissance/terreur provoquée par des destructions massives. Tout en restant assez sobre, A wrinkle in the skin ne déçoit pas sur ce plan-là. Prenant place sur l'île de Guernesey et au sud du Royaume-Uni, le roman offre quelques scènes mémorables, du tremblement de terre en soi dont la violence est fort bien rendue jusqu'à une retraite de la mer qui assèche du jour au lendemain la Manche en passant par des tankers échoués et une croute terrestre déchirée.

La narration, elle aussi, est très sobre. Matthew est sur Guernesey, où après le choc quelques survivants tentent de s'organiser, entre violence et coopération. Mais Matthew a son petit fantasme : de l'autre côté de la Manche, peut-être sa fille a-t-elle survécu ? Alors, en compagnie d'un enfant, Billy, qui s'incruste avec lui, il se lance dans cette quête dont on devine à l'avance l'échec. Cette dynamique entre un homme adulte et un jeune garçon évoque fortement La route. En chemin, en plus de faire face au nouveau monde physique, il doivent affronter le nouveau monde social. John Christopher dépeint habillement des survivants aux profils divers, de la démence totale à l’imperturbabilité apparente, en passant par tout le spectre du trauma.

L'une des scènes les plus marquantes est la suivante : Matthew s'est temporairement joint à un groupe de survivants. Peu après avoir sauvé les femmes d'une bande de pillards, il papote avec celle qu'il trouve attirante et dit quelque chose comme ça: « Eh bien, heureusement que je suis arrivé, parce que, heu, hem, ils auraient peut-être pu vous violer... » Et la femme répond : « Mais qu'est-ce qui te fait croire que ce n'est pas arrivé ? Parce qu'on en a pas parlé ? » Et elle enchaine en racontant toutes les fois où elles se sont faites violer depuis le début du chaos, les effets psychologiques, comment elles ont pris des mesures contraceptives, le tout sur un ton terriblement détaché. Pendant ce temps, Matthew, dont la naïveté est déchirée, ne sait pas où se mettre. Une scène franchement puissante.

On entend souvent parler de la coopération et de la bienveillance qui émergent au cours des catastrophes naturelles entre les victimes. Mais, dans ces cas-là, la civilisation familière n'est pas remise en cause, il faut juste se remettre sur pattes avant de se relancer dans la course. Mais dans le cas d'une catastrophe aussi radicale, il n'y pas d'exemples dans l'histoire humaine récente : ainsi toutes les possibilités sociales et psychologiques restent ouvertes, laissant aux écrivains le loisir de développer leurs hypothèses.

Finalement, comme Max dans Mad Max Fury Road, Matthew renonce à son fantasme pour se concentrer sur ce qu'il sait avec certitude être bien réel : Billy, qui l'accompagne, et la micro-société de Guernesey. Il cesse de courir après des chimères, et accepte la morne réalité. La fin est relativement optimiste : avec un peu de chance, ce groupe de personnes acceptables, isolé sur les îles qui n'en sont plus vraiment, parviendront à recréer quelque chose. Je ne suis pas certain que A wrinkle in the skin atteigne le niveau des deux romans cités plus haut, mais il reste un très bon récit apocalyptique.

220 pages, 1965

2 commentaires:

  1. C'est pour moi, ça. Je le note !

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    1. Vaut clairement le coup pour amateur du genre. Pas de traduction en français dispo ceci dit.

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