mercredi 26 février 2014
Narcisse et Goldmung - Hermann Hesse
Le moine de Hesse n'est pas du tout comme celui de Lewis : Narcisse est droit et vertueux, c'est un penseur qui dédie sa vie au savoir et à sa communauté. Alors qu'il est encore jeune, il va s'attacher à un enfant nouvellement arrivé au monastère. Goldmund, comme Narcisse, est un être qui sort de l'ordinaire, et tout deux seront attirés l'un vers l'autre. Leur amitié est basée sur leur complémentarité : Goldmund aimerait comme son ami devenir un savant, mais Narcisse parvient à lui faire comprendre qu'il est un être sensible, fait pour vivre de passions et non dans la froide raison. Un jour, à l’occasion d'une sortie, Goldmund est initié à la sensualité par une femme, et c'est le déclic : il décide de partir sur les routes. Et commencent de longues années d’errance, occasion d'explorer le désir et l'amour, d'observer le monde, d'en cueillir la beauté et d'en subir la violence. Il trouvera bien des endroits où se poser, il apprendra notamment à transcender sa condition à travers l'art, la sculpture, mais toujours la route l'appelle, car pour que l'artiste ait des expériences à exprimer il doit d'abord en vivre. Les années passent, Goldmund évolue, et peut être viendront les retrouvailles avec le sage Narcisse, qui dans sa retraire n'est pas confronté aux dangers du monde mais aux abimes de son esprit.
L'émotion et la raison, le passionné et le penseur, l'artiste et l'intellectuel. Narcisse et Goldmung sont deux opposés attirés l'un vers l'autre, ayant besoin l'un de l'autre pour apprendre et s'épanouir. Goldmung a besoin de Narcisse pour se trouver lui-même, et Narcisse à besoin de Goldmung pour ne pas sombrer dans la froide indifférence de la raison. Goldmung est un idéaliste, dans son expérience de la vie, il refuse tout compromis, il fuit la sécurité pour courir après ses désirs. Son voyage initiatique n'aura pas de fin, toujours il progresse, il change, il évolue, toujours il va plus loin. Il expérimente la fragilité de la vie, il traverse la désolation de la peste, il croise des visages ravagés par le plaisir comme par la douleur.
Narcisse et Goldmung est un roman qui m'a énormément touché. Tout est opposition : émotion/raison, vie active/vie contemplative, poursuite de la liberté/renoncement ... Dans cette impossibilité d’être un être équilibré, comment s'accomplir ? L'équilibre est-il même souhaitable, ces deux personnages ne sont-ils pas exceptionnels grâce à leurs personnalités extrêmes ? J'ai été bien moins convaincu par une autre thématique, la quête de la figure maternelle. Mais bon, peu importe, l'ensemble est plutôt génial, magnifiquement écrit, riche en exploration de l'esprit humain comme du monde humain ... Un très beau roman, intelligent et touchant.
252 pages, 1930, Le livre de poche
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