lundi 3 mars 2014
Le temps des changements - Robert Silverberg
Le temps des changements est un roman en deux parties assez différentes. Les 100 premières pages nous racontent la jeunesse de Kinal, le narrateur, qui rédige ce récit de sa vie isolé dans une cabane, seul et traqué. On sait donc dès le début comment les choses se termineront. On apprend que Kinal, fils cadet d'un monarque, a du fuir sa patrie une fois son frère sur le trône, par crainte de voir sa tête tomber en tant que prétendant principal à la couronne. Suivent quelques années de voyage en exil. Mais surtout, cette première partie est l'occasion de comprendre le monde de Kinal. On a droit à de nombreuses précisions géographiques, pas des plus passionnantes. Mais le plus important est la façon dont est structurée cette société : toute démonstration d'individualité est proscrite. Ainsi chacun doit utiliser "on" au lieu de la première personne, qui est considérée comme extrêmement vulgaire. Il est aussi tabou de parler de soi, d'exprimer ses sentiments et ses pensées profondes, sauf à sa sœur et son frère par le lien, choisis arbitrairement à la naissance. Malheureusement il s'agit surtout d'un récit d’aventures et de voyage, et l'on saisit finalement assez mal l'importance des tabous locaux.
Tout change quand Kinal rencontre un commerçant terrien qui, heureux de rencontrer sur cette planète quelqu'un d'un plus curieux et ouvert d'esprit que la moyenne, s'ouvre à lui et lui exprime son scepticisme vis à vis des conventions sociales locales. On comprend mieux ces dernières quand le narrateur commence à les remettre en question et à s'y opposer directement. Il y aurait même, semble-t-il, une mystérieuse drogue qui permettrait de fusionner son esprit avec autrui (on sent bien l'influence de l'époque de laquelle date le roman). Et l'on s'en doute, est venu pour Kinal le temps des changements. Mais que faire, seul, face à des centaines d’années de tradition et des institutions solidement établies ? Si la libération individuelle est possible, à vouloir la répandre, on ne peut que se heurter aux puissants gardiens de l'ordre établi.
Je n'irai sans doute pas parler comme en quatrième de couverture d' « incontestable classique », Silverberg a fait mieux à mon sens ( Les monades urbaines, Le livre des crânes ...), mais Le temps des changements n'en demeure pas moins un très bon petit roman, particulièrement intéressant grâce à la société imaginée et sa réflexion sur le changement (individuel comme sociétal).
254 pages, 1971, Le livre de poche
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