Après les hautement sympathiques thrillers SF qu'étaient Dark Matter et Recursion, Blake Crouch déçoit avec son dernier bouquin. C'est une histoire de super-humains augmentés génétiquement qui se laisse lire en diagonale, mais on revient vers du techno-thriller banal.
- Ce n'est absolument pas original, ce concept est déjà lu, vu, revu et relu. Ce n'est pas un problème en soi, tout dépend ce que l'auteur en fait, mais justement, il n'en fait pas grand-chose. Comparée aux deux précédents romans, qui tendaient vers le maximalisme, la trame est ici parfaitement convenue, dénuée de surprises percutantes. La fin est une longue scène d'action soporifique.
- J'ai aprécié les détails concernant la biologie — il aurait été facile de les survoler encore plus légèrement, mais ça apporte un peu de densité.
- L'écriture de l'hyper-intelligence est décevante. Comme dans les deux précédents romans de l'auteur, c'est un sujet casse-gueule, mais cette fois il n'y pas assez d'éléments stimulants pour distraire le lecteur. Ces humains avec des QI de 250 ont des réflexions franchement basiques, notamment sur le rapport entre intelligence et émotion.
- Il y a un gros problème narratif. Pourquoi notre narrateur décide-t-il instantanément que répandre le virus de l'hyper-intelligence à travers le monde est une mauvaise idée ? Alors oui, il y a évidemment des tonnes de questions éthiques et pratiques qui se posent, et ça a l'avantage narratif de créer un conflit avec l'antagoniste, mais qu'est-ce qui pousse notre narrateur à faire ce choix, au-delà d'un évènement sans lien direct qui s'est déroulé 15 ans auparavant ? Dans Dark Matter et Recursion, il est évident que les technologies explorées posent un danger considérable pour l'espèce humaine, et c'est exploré pleinement par le récit, sans ambiguïté. Mais là, je ne sais pas, ça ne serait pas mieux si tout le monde avait une bien meilleure compréhension de soi-même et de l'univers ? Si tout le monde avait un accès total à sa mémoire et la capacité d'enfin apprendre de ses erreurs ? Si chacun était en bien meilleure santé physique ? Et avait non seulement les capacités de percevoir la complexité et l'importance du dérèglement du système Terre, mais en plus la volonté et les capacité d'agir ? Il aurait fallu plus d'effort narratif pour justifier la quête du protagoniste — ou embrasser plus franchement l'ambiguïté morale de la situation.
- Ceci dit, j'ai aprécié l'épilogue, où il est révélé que le protagoniste a finalement mené à bien sa version du projet d'upgrade de l'espèce humaine — mais un upgrade de la capacité à la compassion. C'est une conclusion pertinente.
Ma foi, si jamais Blake Crouch publie un nouveau thriller typé SF, je resterai tenté d'y jeter un œil.
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