jeudi 8 mars 2018
La tour de verre - Robert Silverberg
Relecture d'un autre petit roman de Silverberg. Dans environ 200 ans, le milliardaire mégalo Siméon Krug construit une tour de verre d'un kilomètre et demi de haut quelque part dans un coin paumé de la toundra. Ce n'est pas simplement pour flatter son ego : la tour permettra d'envoyer des messages plus rapides que la lumière vers une planète d'où proviennent de mystérieux signaux. Mais ce n'est qu'une toile de fond. Le vrai sujet du roman, ce sont les androïdes, qui ont fait la fortune de Krug, leur inventeur et créateur. Ce sont les androïdes qui suent et qui meurent sur le chantier de la tour, ce sont les androïdes qui font toutes les basses besognes d'une humanité dont la population a drastiquement baissé.
Et si certains d'entre eux se lancent en politique pour réclamer à l'humanité le droit d'être autre chose que des objets, la plupart se réfugient dans la religion. Il vénèrent Krug, qui est littéralement leur créateur. Il attendent que Krug décrète la fin de leur période d'épreuves et place les nés-de-la-cuve à égalité avec les nés-de-la-matrice. C'est tout cet aspect qui fait l'intérêt de La tour de verre. Silverberg va jusqu'à réécrire une sorte de bible androïde, à leur imaginer des rituels complexes et crédibles. Les androïdes se réfugient dans le religion pour se cimenter en tant que communauté, pour s'inventer une identité et pour accepter leur sort de sous-humains. Comment réagirait le tumultueux Krug s'il venait à apprendre qu'il a été érigé en divinité par ses créatures ? On peut deviner que ce serait une mauvaise idée pour lui de contredire leur foi... Un bon roman, certainement, mais un peu trop éparpillé pour son propre bien. Les idées s'accumulent sans toujours murir : l'intrigue avec la potentielle forme de vie lointaine, le chantier titanesque de la tour, la pulsion vitale débordante de Krug, les doutes de son fils écartelé entre un mariage raté et une amante androïde qu'il désire follement, l'organisation complexe et secrète de la société androïde, le système de téléportation planétaire, la disparition de la classe ouvrière, un androïde qui apprend à être plus humain par le sexe, la théologie de l'église androïde... Au moins, à cette période de sa carrière d'écrivain, Silverberg n'exploite pas ses idées jusqu'à la corde et ne prend pas le risque d'ennuyer son lecteur.
318 pages, 1970, le livre de poche
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