vendredi 1 février 2013
Au cœur des ténèbres - Joseph Conrad
Le voici enfin, le grand Au cœur des ténèbres, qui a inspiré le tout aussi grand Apocalypse Now, mais aussi le film Aguirre, la colère de Dieu, dont je n'ai que de lointains souvenirs, et même le récent jeu Spec Ops: The Line, qui transpose la trame globale du roman de Conrad dans un Dubaï ravagé par les sables (et s'en tire plutôt bien, même si l'équilibre entre la narration sombre et mature et le coté blockbuster bourrin n'est pas parfaitement maitrisé). Grand, mais court : seulement 190 pages, dont 70 d'une longue préface que la plupart des lecteurs sauterons.
Étant paru en 1899, Au cœur des ténèbres pourrait difficilement évoquer la guerre du Vietnam, comme le fait sa réinterprétation cinématographique. A l'embouchure de la Tamise, un groupe de marins s'ennuie sur le pont d'un navire banal. Seulement, au sein d'eux, se cache Marlow, un homme qui a vécu des expériences pas banales du tout. Et voilà qu'il commence à raconter son histoire, sa plongée au plus profond des ténèbres de l’Afrique. Conrad maintient un certain flou : la narration n'est pas toujours linéaire, il y a des ellipses, des distorsions du temps ... Il est toujours difficile de savoir où l'on est, de mesurer le temps qui s'écoule. Ce qui est certain, c'est qu'au fur et à mesure que Marlow s'enfonce dans cette contrée perdue, la limite entre humanité et sauvagerie tend à devenir plus mince, plus fragile. Marlow n'est pas vraiment le personnage principal du récit, non, il s'agit plutôt de Kurtz, l'homme qu'il est chargé de retrouver. Bien avant qu'il ne le rencontre en personne, Kurtz est au centre de la plupart des conversations. Un homme brillant, un orateur hors pair, un leader né promis à un grand avenir. Seul au cœur de la jungle, il montre son talent en faisant parvenir des quantité faramineuses d'ivoire. Il faut pourtant le retrouver, il est dans cette jungle depuis si longtemps ...
Que de chemin parcouru pour Conrad depuis La folie Almayer ! Il nous entraine dans un univers sombre, sans espoir, où le plus brillant des hommes choisit la sauvagerie, l'horreur, où la raison humaine ne tient qu'à un fil menaçant à tout instant de rompre pour laisser la place à la barbarie primitive, le tout dans un contexte de colonisation très marqué. Bien que très court, Au cœur des ténèbres est un roman poisseux, sombre, mystérieux, et surtout fascinant.
190 pages dont 70 d’introduction, 1899, GF Flammarion
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Bonjour,
RépondreSupprimerJe viens de lire moi aussi ce roman, premier titre de Conrad que je découvre pour ma part.
J'en ai aimé l'atmosphère lourde, mystérieuse et menaçante, et l'écriture de Conrad, très évocatrice.