dimanche 24 février 2013
Flatland - Edwin A. Abbott
Cette édition de Flatland, c'est le genre de bouquin qui attire l’œil en librairie, sur la table des nouveautés du rayon imaginaire, au milieu de couvertures généralement bien convenues. Noir et sobre, illustré simplement de formes géométriques, on a envie de le saisir, on veut savoir de quoi il parle. Eh bien c'est loupé, à l'arrière, pas de synopsis, juste une citation de Ray Bradbury : « Faites vous aussi plat qu'une crêpe et glissez vous dans ce livre ». La curiosité du lecteur est plus qu’éveillée, la suite logique est donc de feuilleter le bouquin. Et là, surprise : la mise en page est totalement ... bizarre. Bizarre, mais réussie. Les blocs de texte sont de formes géométriques diverses et variées, le tout est agrémenté de schémas et de couleurs ... Bon, d'accord, mais on ne sait toujours pas de quoi ça parle.
Le tire du roman doit être prit au sens propre : Flatland, c'est l'histoire un pays plat. Un monde en deux dimensions. Et le narrateur n'est autre qu'un carré. Il commence simplement par nous décrire son pays, ses règles, ses coutumes, son histoire. C'est une société très hiérarchisée : plus l'on a de cotés, plus l'on se situe haut sur l'échelle sociale. Je ne vais pas en dire beaucoup plus, le roman étant très court, il serait dommage de trop en révéler. Sachez juste que ce monde n'ayant que deux dimensions, tout ce que voient ses habitants prend la forme d'une ligne, ce qui n'est pas sans poser quelques problèmes ... Dans la seconde partie du roman, le narrateur va évoquer sa visite en Lineland, un pays constitué d'une seule dimension. Bien sûr, essayer d’expliquer à ses habitants l'existence d'une seconde dimension n'est pas chose aisée. Puis, le même processus se répète, cette fois au détriment de notre narrateur : il reçoit la visite d'une sphère qui tente de le convaincre de l’existence d'une troisième dimension et de Spaceland. Mais notre carré n'est pas si naïf : une troisième dimension ? N'importe quoi !
Il est assez impressionnant de penser que Edwin A. Habbott a publié ce roman en 1884. Non seulement il n'a pas prit une ride au niveau du style, mais surtout, le contenu, pourtant scientifique et donc à priori sensible au passage du temps, se révèle absolument passionnant. On se situe aussi bien au niveau de la satire sociale que de la science fiction la plus renversante. Au delà des détails de l'organisation de la vie à Flatland, sujet riche aussi bien en humour qu'en pistes de réflexion, notre carré, à travers son parcours initiatique et l’évocation de la quatrième dimension (et des suivantes), amène vraiment l'une de ces interrogations profondes que l'on aime retrouver dans le versant hard science de la SF. En effet, de la même façon que les habitants de Flatland considèrent comme absurde et dangereuse l'idée d'une troisième dimension, les habitants de Spaceland rejettent catégoriquement la possibilité d'une quatrième dimension ... ce qui ne les empêche pas de vouloir convertir les flatlandiens à la religion de la troisième dimension.
Sorte de Micromégas des mathématiques, Flatland est un bouquin vraiment génial. Cette "fantaisie en plusieurs dimensions" est drôle, riche, accessible, renversante, satirique, originale et parvient à toujours trouver un ton juste et riche en sous-entendus. Et comme si cela ne suffisait pas, la mise en page de cette édition est vraiment bien faite et toujours adaptée aux propos du roman.
151 pages, 1884, Zones sensibles
Vous pouvez aussi lire l'avis de Nébal.
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