Un livre énorme, débordant d'exemples précis et détaillés. En conséquence, bien que persévérant, je m'y suis un peu noyé, et me suis contenté de survoler les 100 dernières pages. Ceci dit, il y a de quoi faire avec le reste.
Pour dire les choses simplement, l'idée centrale du livre est que « Notre modèle économique est en guerre contre la vie sur Terre ». En gros, aucune solution à la crise environnementale n'est possible sans changer la société dans son ensemble, c'est à dire mettre fin au néo-libéralisme et à l’extractivisme (l'exploitation massive et aveugle des ressources naturelles et en particulier des combustibles fossiles). Naomi Klein et ses collaborateurs ont mis 5 ans à façonner ce livre, et, sans surprise, il est convainquant.
Pour éviter l’effondrement, le climat commande une diminution de l'utilisation des ressources par l'humanité ; pour éviter l'effondrement, le système économique commande une croissance sans entrave. Il n'est possible de changer qu'un seul de ces ensembles de règles, et ce n'est pas celui des lois de la nature. (p.33)Le livre est un développement massif de ce thème. Notons que les valeurs sont aisément malléables, et si elles ont été poussées dans un sens, elle peuvent l'être dans l'autre :
Un sondage effectué en 1966 auprès d'étudiants américains nouvellement admis à l'université a révélé que seulement environ 44% d'entre eux considéraient comme « important » ou « essentiel » de gagner beaucoup d'argent dans la vie. En 2013, cette proportion avait grimpé à 82%. (p.80)Naomi Klein évoque longuement les accords de libre-échange qui veulent rendre chaque partie du monde voisine de toutes les autres et entravent les initiatives environnementales locales. Les agences environnementales qui peuvent être incohérentes jusqu'au point de forer elles-mêmes des puits de pétrole en zone protégée, ou qui encouragent d'illusoires solutions au problème qui soient compatibles avec le laisser-faire des marchés Les multinationales des énergies fossiles qui ne peuvent rien faire d'autre que continuer leur carnage sous peine de s’effondrer et d'emporter avec elles toutes les richesses qui leur sont associées, et qui cherchent les énergies fossiles de façon toujours plus dangereuse et polluante (fracturation hydraulique, sables bitumeux...), et pour cela s'attaquent à des zones naturelles toujours plus vastes, parfois grandes comme des pays entiers (« Pour que leur valeur reste stable ou s'accroisse, les sociétés pétrolières et gazières doivent toujours être en mesure de démontrer à leurs actionnaires qu'elles disposent de réserves de combustible prêtes à exploiter une fois épuisées celles en cours d'extraction » [p.174]). Les milliardaires qui se parent d'un vernis vert et se posent en défenseur du climat alors que les sources mêmes de leurs revenus sont en totale opposition à ces idées. Le fantasme d'une solution technique au problème venue de géo-ingénierie qui permet de continuer comme si de rien était en se disant que la science, alliée au libre marché, trouvera une solution miracle (cette pseudo-solution est, sans surprise, surtout défendue par ceux qui ont intérêt à ce que rien ne change).
Rappelons les trois tristes piliers du néo-libéralisme. (p.94) « Ces piliers soutiennent le mur idéologique qui, depuis de dizaines d'années, empêche le déploiement de solutions sérieuses pour endiguer le déséquilibre climatique » :
- Privatisation du secteur public.
- Déréglementation des marchés.
- Allègement du fardeau fiscal des entreprises financé par la réduction des dépenses publiques.
2014, 530 pages, actes sud/lux
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