mardi 25 décembre 2012
Le double - Dostoïevski
Le double est le second roman de Dostoïevski, et il a reçu un accueil critique plutôt défavorable à sa publication, en 1846. On y suit Goliadkine, un personnage perturbé (et pas qu'un peu) qui va se retrouver face à un double de lui même, un double peu amical ...
Goliadkine est un petit fonctionnaire. Un personnage plutôt banal empêtré dans la bureaucratie, comme en en trouve chez Kafka ou encore Gogol. Et dès le début, on fait face à ce qui est, à mon sens, le plus gros défaut du récit : tout est assez confus. On ne comprend pas vraiment tout ce qui se passe dans la tête de notre héros. Certes, il est évident que c'est un choix stylistique de l'auteur pour nous faire ressentir les tourments de son personnage, mais tout de même ... Il y a un nombre assez incroyable de répétitions, d’expressions ou de noms propres qui reviennent deux, trois, quatre fois dans une seule phrase. C'est sur, cela nous met bien dans la thématique du double, mais se taper sans arrêt des "Non, s'il vous plait, Antoine Antonovitch, je ... vous ... voyez-vous, Antoine Antonovitch, je crois, Antoine Antonovitch, que je ne me suis pas bien fait comprendre." et autres répétitions, c'est un peu lourd. Il y a même une page où le nom de ce fameux Antoine Antonovitch est cité pas moins de treize fois. Sans compter que Goliadkine ne cesse de changer d'avis, de ne pas savoir ce qu'il veut, de revenir sur ses décisions ... sa confusion déteint sur le lecteur, au détriment de la clarté de l'intrigue. Je crois que je suis passé passé un peu à coté de cet effet de style qui couvre tout le roman, il m'aurait paru plus naturel qu'il soit intégré plus progressivement, pour souligner la perte de raison de Goliadkine.
Quoi que, on est en droit de se poser la question : Goliadkine devient-il progressivement fou ou l'est-il dès le début ? Ou alors ne l'est-il pas du tout, peut-être est-ce le monde qui est fou. Car le monde ne semble pas s'émouvoir particulièrement quand le double apparait, et pourtant, il a le même nom et exactement le même physique que notre héros. Et tous trouvent ça normal, personne ne se rend compte que Goliadkine se fait littéralement pourrir la vie par son double. Donc, la question se pose : le double existe-t-il ailleurs que dans la tête de notre héros ? Le double a tout ce que Goliadkine n'a pas : l'aisance en société, un charme naturel, un incroyable talent pour lécher les bottes de ses supérieurs ... Et tous ces atouts vont croissant alors que le vrai Goliadkine chute de plus en plus rapidement : à travers son incapacité à s'exprimer, sa peur des complots et sa permanente confusion, il effectue un véritable suicide social. Et son double (lui même ?) l'enfonce toujours plus.
Au final, dans Le double, Dostoïevski adopte un style qui retranscrit à merveille la frénétique lutte intérieure de son héros. Dommage que cela nuise à la clarté du récit et au plaisir de lecture. En dehors de ça, Dostoïevski reste un auteur génial, et il nous livre ici un bon roman. Mais il fera plus tard beaucoup mieux sur le même thème (folie et suicide social) avec Le sous-sol, qui lui est bel et bien un chef d 'œuvre.
250 pages, 1846, Folio
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Je crois que vous n'avez pas compris ce roman.
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