dimanche 4 juin 2023

What if? - Randall Munroe

What if? - Randall Munroe

Quand Randall Munroe, l'auteur de xkcd, se met au format livre, c'est un succès (commercial) retentissant. La principale qualité de What if?, c'est sa grande lisibilité : la recette qui se déploie ici est terriblement stimulante et parvient à éveiller la curiosité avec une force rare. On se demande toujours à quelle idée surprenante l'auteur va s'attaquer à la page suivante, quelle logique capillotractée il va lui appliquer, de quels dessins marrants il va accompagner son texte...

Et si les questions explorées frôlent souvent avec l'absurde, elles sont souvent l'occasion d'évoquer des sujets plus que dignes d'intérêt et de faire quelques jolis passages de vulgarisation scientifique humoristique. Par exemple, je retiens le chapitre sur le rhume qui donne quelques bases de virologie. J'aime l'idée que chaque personne ayant ce qu'on appelle au sens large le rhume (en fait divers rhinovirus) infecte, en moyenne, exactement une autre personne : si c'était moins, le virus s'évanouirait, si c'était plus, tout le monde le chopperait en même temps. Et ces exemples historiques de navires de ravitaillement s’amarrant sur des îles isolées et répandant à chaque fois un virus qui infecte toute la population de l'île avant de s’éteindre, car il n'a plus personne à infecter qui n'ait pas développé d'immunité, donne une image claire de la façon dont se baladent les virus. J'ai aussi beaucoup aimé ce chapitre sur l'auto-fertilisation, qui donne cette fois des passionnantes bases de génétique. 

If someone produces a child on their own, it dramatically increases the likelihood that the child will inherit the same chromosome on both sides, and thus a double multiplier.

In general, if you have a child with yourself, 50 percent of your chromosomes will have the same stat on both sides. If that stat is a 1—or if it’s a multiplier—the child will be in trouble, even though you might not have been. This condition, having the same genetic code on both copies of a chromosome, is called
homozygosity.

In humans, probably the most common genetic disorder caused by inbreeding is spinal muscular atrophy (SMA). SMA causes the death of the cells in the spinal cord, and is often fatal or severely disabling.

SMA is caused by an abnormal version of a gene on chromosome 5. About 1 in 50 people have this abnormality, which means 1 in 100 people will contribute it to their children... and, therefore, 1 in 10,000 people (100 times 100) will inherit the defective gene from both parents.

If a parent has a child with his- or herself, on the other hand, the chance of SMA is 1 in 400—since if he or she has a copy of the defective gene (1 in 100), there’s a 1 in 4 chance it will be the child’s only copy.

Ce n'est là qu'un petit extrait hors contexte, mais c'est peut-être l'article qui vaut le plus le coup d'être lu. Je note aussi une belle phrase que j'espère avoir l'occasion de replacer :  « Self-fertilization is a risky strategy, which is why sex is so popular among large and complex organisms. »

Je pourrais citer d'autres passages particulièrement intéressants, mais il faut aussi évoquer quelques grammes de négativité ! Si l'humour ne fait pas toujours mouche (particulièrement les incessantes notes de bas de page), ce n'est pas trop grave. En revanche, c'est plus gênant quand c'est le cœur même de l'ouvrage qui déçoit : la vulgarisation scientifique. Bon, quand il y des formules mathématiques, très bien, je me contente de croire l'auteur sur parole, mais il y a des moments où je me dis que je devrais comprendre un truc, mais c'est expliqué de façon si expéditive que ça m'est impossible. Par exemple, l'idée que chaque lettre de la langue anglaise contient entre 1 et 1,2 bits d'information : j'ai beau relire les lignes en question, il n'y a aucune explication sur comment on en arrive à cette conclusion. Il y a d'autres occurrences de ce genre. Ainsi j'aurais préféré que Ranfall Munroe laisse tomber quelques-unes des questions les moins intéressantes pour aller se concentrer sur l'étoffement de certaines des réponses.

Bref, quelques réserves, mais What if? reste le genre d'objet littéraire qui mérite le détour. En revanche, un point est impardonnable. Il y en couverture un T.rex alors qu'on en trouve aucun dans le livre. Bon, pourquoi pas, mais en quatrième de couverture on nous promet la réponse à question suivante : « How many humans would a rampaging T-rex need to eat each day? » Et cette question n'est absolument pas présente dans le livre ! Ni sa réponse d'ailleurs. Blague à part, c'est sans doute une erreur d'édition, mais ça reste pas cool du tout. Il faut aller par là pour voir sa curiosité satisfaite.

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