mercredi 4 juin 2025

The Obstacle is the Way - Ryan Holiday

The obstacle is the way - Ryan Holiday

Plongée rapide dans le développement personnel mainstream et américain #1

Il y a peu, je me suis retrouvé pour la première fois depuis longtemps dans une librairie d'aéroport partiellement anglophone. Je m'y attendais, j'y allais même pour ça — dans la librairie, pas dans l'aéroport  mais j'ai néanmoins été frappé par la présence si clairement dominante du genre self-development au sens large. C'est dans ce type de cadre aéroporté que j'ai pu me procurer par le passé notamment Thinking Fast and Slow (excellent, dépasse largement la catégorie self-help mais touche le même public) et The Power of Habit (pas mal du tout). Ces deux ouvrages, devenus classiques, étaient toujours présents dans cette librairie, mis en avant. J'ai eu envie de m'attaquer un peu plus sérieusement à ce genre de littérature, mais, étant suprêmement sceptique devant la majorité des ouvrages présentés, je n'ai cette fois rien acheté. 

The Obstacle is the Way date de 2014 et Ryan Holiday est sûrement partiellement responsable de la résurgence populaire moderne du stoïcisme. J'avais conscience de ses bouquins à l'époque, mais je doutais fortement de leur intérêt face aux textes millénaires des auteurs classiques. Après lecture (ou plutôt écoutage distrait), je confirme sans surprise que c'est plus que dispensable.

Ryan Holiday a été directeur du marketing d'une grande marque avant de devenir l'assistant de Robert Greene, l'un des gourous du développement personnel. Holiday est un pro. Il sait se vendre, il a une importante capacité de travail et de lecture, il publie régulièrement, il connait les ficelles — ça se sent. La formule est claire : on commence un chapitre avec une petite histoire sur un personnage, peut-être antique mais plus probablement américain, puis on développe l'idée qu'illustre cette histoire, avant de passer à la suivante. Idéalement, on essaie d'avoir une progression logique entre ces idées. Et on ajoute une bonne dose d'exhortations sur le fait que oui, toi aussi lecteur, tu peux atteindre le succès, la réussite, il faut juste le vouloir, etc.

L'obstacle est le chemin : le thème est clair, limpide, explicite. Amor fati, faire face à l'adversité rend meilleur, etc. Les Anciens en parlent évidemment mieux, avec des mots souvent intemporels. Alors on s'ennuie un peu face au tirage à la ligne de Ryan Holiday. On soupire quand on constate que son premier exemple est... John Rockefeller. On soupire à nouveau quand il se penche sur... Steve Jobs. C'est terriblement Silicon Valley friendly, tourné vers les entrepreneurs, vers le succès économique, etc. Difficile aussi de faire l'impasse sur l'éternel biais du vainqueur qu'évoque cette suite de personnages fameux. Utiliser la réussite sociale pour justifier la valeur des vertus défendues me semble hautement suspect. Il aurait aussi fallu évoquer des perdants, des misérables, ou simplement des gens du commun, qui parviendraient à vivre cette philosophie dans l'ombre, sans que le destin leur offre l'argument sophistique du succès. Ou tout simplement se passer de ces anecdotes — mais il ne resterait plus guère de livreA l'inverse de ses modèles antiques, Ryan Holiday ne pratique pas l'introspection, il ne parle pas de son expérience, de ses tourments, de ses propres progrès philosophiques.

Ryan Holiday est clairement plus marketeux que philosophe. Pour qui cherche résilience et inspiration je conseillerais mille fois plus les Anciens. Ceci dit, parmi les prolifiques gourous du self-help, on pourrait aisément tomber plus mal. J'ai lu bien pire. J'ai commencé à écouter son ouvrage suivant, Ego is the enemy, pour voir s'il s'y occupe plus de morale, mais je ne suis pas certain d'en faire un compte-rendu, tant cette littérature n'est guère sérieuse.

Concernant tous les personnages célèbres évoqués, je retiens particulièrement le post-sciptum : Ryan Holiday y liste toutes ces figures historiques qui utilisaient les textes classiques du stoïcisme comme guides et modèles pendant leur existence. C'est efficace pour que le lecteur se sente inclus dans cette liste, comme héritier non seulement des anciens stoïciens devenus mythes, mais héritier des étudiants du stoïcisme, ces gens plus proches et concrets qui, eux aussi, comme Sénèque, couraient après la vertu. Ayant été moi-même profondément marqué et influencé par ma lecture des stoïciens il y a plus de 10 ans, c'est le seul passage qui m'a touché.

Allez, je cite une ligne :

We talk a lot about courage, but at its most basic level, it's about taking action.

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