samedi 30 décembre 2017

Kalpa impérial - Angélica Gorodischer


Kalpa impérial - Angélica Gorodischer

Comme les Chroniques martiennes de Bradbury, Demain les chiens de Simak ou les Récits apocryphes de Čapek, Kalpa impérial est un roman composé de plusieurs nouvelles qui, ensemble, forment un tout vaste et cohérent. Et comme pour ces exemples, on reste dans le thème de la chronique historique. L'empire dont parle Angélica Gorodischer est vaste, colossal. Il s'étire à travers les continents et les millénaires. On suit essentiellement les pas des hommes et des femmes de pouvoir, des empereurs et des impératrices, des conspirateurs et des imposteurs. Certains sont bons, d'autres mauvais, et la plupart moyens.

Angélica Gorodischer maitrise sa narration, clairement. Elle étoffe ses personnages avec une vitesse surprenante, les rendant attachants ou détestables en quelques pages. Elle explore les souterrains de la puissance, où les ambitieux peuvent faire de meilleurs chefs que les bienveillants, où les plaisirs les plus primaires de quelques individus décident de la destinées de contrées entières, où se débattent quelques êtres bons rendus fous par leur position de dieu vivant. Cette valse historique est profondément imprégnée de l’atmosphère des récits qu'on récite au coin du feu à un auditoire avide d'entendre les légendes du passé. De nombreux personnages sont des conteurs, des curieux, qui attachent de l'importance à ce qui a existé avant eux, ou a ce que les hommes imaginent avoir existé avant eux.

Le principal défaut de Kalpa impérial, c'est son statut de fantasy. C'est à dire que malgré les milliers d'années qui s'écoulent, rien ne change ni n'évolue vraiment. Une impératrice succède à un empereur, une ville tombe en ruine ou traverse une période dorée, l'empire est en guerre contre le sud, puis en paix, puis en guerre, puis en paix, ainsi à l'infini. Certes, c'est sans doute le propos de l'auteure : les soucis humains sont intemporels, les problèmes que l'on croit importants se noient dans l'immensité de l'histoire, et tout n'est que vent et fumée. Mais quand on atteint la moitié du roman et que l'on réalise ça, c'est décevant. Dans la réalité comme dans les œuvres citées plus haut, les choses changent. Et souvent elles changent violemment, radicalement. Ici, pas d'évolution politique, religieuse, philosophique ou scientifique. Le monde s'agite, mais reste le même. On s'y bat pour le pouvoir, pas pour des idées. Cela n'enlève pas à Angélica Gorodischer son très réel talent de conteuse, mais la portée de son roman en est limitée.

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