jeudi 2 août 2012

Albert Sánchez Piñol - La peau froide

Albert Sánchez Piñol - La peau froide

La peau froide est un roman horrifique, ou au moins fantastique. Deux hommes, sur une toute petite ile, résistent nuit après nuit contre les assauts de hordes de créatures aquatiques qui sembleront presque familières à l'amateur de Lovecraft. Au fond, peu importe comment les deux personnages sont arrivés là. Il fuyaient quelque chose et cherchaient l'isolement.

Au début, on apprend via quelques flashbacks quel cheminement à amené le narrateur à rechercher la solitude sur l'ile. Quand à l'autre personnage, Batis, son passé restera très opaque. Sa personnalité est très ... particulière, et cela entrainera bien évidemment un conflit interne entre les deux hommes en plus du conflit contre les créatures. D'un point de vue d'écriture et de construction, le roman est vraiment très bon. Il arrive à ne pas rendre lassant des événements qui auraient pu devenir répétitifs, à rendre la survie sur l'ile vraiment prenante, immersive, tout en laissant une large place à personnalité des personnages et à leur rapport entre eux et avec les monstres.

A ce propos, il y a un aspect du récit qui m'a un poil chiffonné. Le narrateur et Batis partagent leur quotidien avec la mascotte. La mascotte, c'est un monstre de la même race que ceux qui les assaillent presque chaque nuit. Un monstre femelle, avec lequel Batis puis le narrateur auront des rapports très intimes. C'est étrange, c'est un peu comme si dans Alien Ripley adoptait un xénomorphe. De la même façon, le narrateur aura une vrai réflexion sur la nature des créatures. Sont ils vraiment des monstres ou une race plus ou moins civilisée qui se bat pour son territoire ou pour des raisons qui nous échappent ? C'est une démarche aussi louable qu'intéressante que de ne pas céder à la facilité d'en faire juste de méchants monstres, mais cela pose quelques problèmes. Ainsi, au début ils seront aussi sauvages que pas très malins, et par la suite il arrivera qu'ils se comportent de manière pacifique, qu'on ai l'impression qu'une sorte de dialogue s'engage entre eux et le narrateur, pour qu'ensuite ils attaquent à nouveau comme une bête horde de monstres. Tout cela rajouté à l'inexplicable comportement soumis de la mascotte, qui cohabite avec les deux hommes, peut plonger le lecteur dans une certaine consternation.

Malgré ces réserves, qui évoquent plus des étrangetés du récit que de vrais défauts, La peau froide est un bon roman très maitrisé. Dans le genre humains contre terribles créatures, il s'impose, notamment grâce au traitement riche et profond de la personnalité des personnages.

260 pages, 2002, Babel. 
Vous pouvez aussi lire les avis éclairés de Nébal et de Cachou, qui m'ont donné envie de lire le bouquin.

CITRIQ

2 commentaires:

  1. La soumission de la mascotte m'a dérangée aussi. Pour la horde "sauvage" puis civilisée, j'y vois surtout une sorte de métaphore de l'autre, qui pourrait être agressée sans que l'allochtone débarquant sur l'île ne comprenne en quoi, mais qui peut être raisonnée aussi parce qu'on lui reconnaît au final le fait d'être composée d'individus intelligents, répondant juste à une autre logique que la nôtre. La menace sourde du début évolue, on comprend qu'elle n'est peut-être pas "sourde" sans raison. Le "mal" prend un visage, mais un visage qu'on ne peut comprendre, parce qu'il nous ressemble et est tellement différent en même temps.

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  2. C'est vrai. Du coup à la fin ils se rendent compte que même s'ils sont deux races intelligentes, leurs différences les poussent malgré tout au conflit. Mais quand même, la mascotte est un élément bien étrange du récit ...

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