Publié aussi sur le site de la pépinière (vu qu'on passe clairement au végétal).
LES VÉGÉTAUX SE SONT DÉVELOPPÉS A PARTIR DES ALGUES VERTES
De nombreuses preuves morphologiques et biochimiques attestent de cette ascendance, notamment des preuves portant sur les ADN nucléaires, chloroplastiques et mitochondriaux d'un grand nombre de végétaux et algues.
Un grand nombre d'espèces de charophytes (ancêtres des plantes) vivent en eau peu profonde, au niveau des rivages. Dans ce milieu sujet à l'assèchement, la sélection naturelle favorise les individus capables de survivre à des périodes d'immersion partielle. Ils ont notamment évolué une couche de polymère, la sporopollénine, qui permet d'éviter la déshydratation des zygotes (cellule formée par l'union de deux gamètes) suite à l'exposition à l'air.
L'environnement terrestre pour les plantes naissantes s'est accompagné d'avantages (beaucoup plus de lumière, beaucoup plus de CO2, sol des rivages riche en minéraux) mais aussi d'inconvénients (rareté de l'eau, manque du soutien structurel offert par l'eau) qui ont mené à des adaptations évolutives.
Rappelons qu'il ne semble pas y avoir de frontière claire entre les végétaux "officiels" et leurs proches parents les charophytes. La limite qu'on trace entre les deux est forcément arbitraire.
Ceci dit, de nombreuses caractéristiques sont uniques aux végétaux (même tous ne sont pas possédés par tous les végétaux) :
- Avoir un épiderme recouvert d'une cuticule composée de cire et d'autres polymères afin d'éviter le dessèchement au contact de l'air.
- Avoir des stomates, pores spécialisés qui permettent la photosynthèse, en facilitant l'échange de CO2 et d'O2 avec l'air ambiant, et l'évaporation d'eau.
- L'alternance de générations : ce n'est pas forcément très visible, notamment chez les plantes à fleur, mais le cycle de développement de tous les végétaux alterne deux générations d'organismes multicellulaires. Ce sont les gamétophytes (souvent microscopiques et hébergés dans les organes reproducteurs de la plante), et non directement le sporophyte (souvent ce qu'on perçoit comme la "plante"), qui produisent les gamètes. C'est franchement contre-intuitif et je ne rentre pas dans les détails.
- Les méristèmes apicaux : zones situées aux extrémités croissantes des plantes (racines comprises), là ùu une ou plusieurs cellules se divisent continuellement. Ces cellules produites par le méristème se différencient pour donner les différents tissus de la plante.
Il en existe d'autres, plus compliquées encore.
Si des micro-organismes avaient déjà colonisé la terre ferme il y a 1,2 milliard d'années, les spores des premiers végétaux semblent apparaitre il y a 470 millions d'années. Les fossiles de structures végétales de plus grande taille datent de 425 millions d'années.
Une façon de caractériser les végétaux repose sur l'absence ou la présence d'un réseau complexe de tissu conducteur (ou vasculaire) composé de cellules formant des canalisations dans lesquelles l'eau et les nutriments circulent dans la plante. La plupart des végétaux modernes sont ainsi des plantes vasculaires. Les végétaux qui en sont dépourvus sont souvent qualifiés de bryophytes.
Les vasculaires forment un clade rassemblant environ 93 % de toutes les espèces de végétaux existants.
Je place ci-dessous le tableau qui récapitule la classification des végétaux :
Mais n'oublions pas qu'il existe aussi des lignées disparues.
LES GAMÉTOPHYTES DOMINENT LES CYCLES DE DÉVELOPPEMENT DES MOUSSES ET D'AUTRES PLANTES NON VASCULAIRES
Les mousses sont les bryophytes les plus emblématiques, cependant, certaines plantes communément appelées "mousses" sont en fait des algues rouges, des lichens, ou même des plantes à fleurs. Dans l'histoire évolutionnaire, les mousses pré-datent les plantes vasculaires.
Contrairement à ce qu'on observe chez les plantes vasculaires, dans le cadre de l'alternance des générations, chez les mousses, ce sont les gamétophytes haploïdes (une seule série de chromosomes) qui sont plus gros et vivent plus longtemps que les sporophytes diploïdes (double série de chromosomes, en paires).
Chez les mousses, la germination de la spore produit la plupart temps un filament qui a l'aspect d'une algue verte et qui n'a qu'une cellule d'épaisseur, le protonéma. Il a une surface étendue qui favorise l'absorption d'eau et de minéraux. Quand les ressources sont suffisantes, il émet un "bourgeon" pourvu d'un méristème apical. Celui-ci engendre la structure qui porte les gamètes, le gamétophore, qui est la structure visible. Protonéma et gamétophore constituent ensemble le gamétophyte.
Les gamétophytes n'ont pas de racines, mais des rhizoïdes, qui ne possèdent pas de cellules conductrices spécialisées et n'interviennent que peu dans l'absorption d'eau et minéraux. Leur rôle concerne surtout la fixation de la plante.
J'essaie de simplifier la description de la vie sexuelle des mousses, mais de nombreuses espèces peuvent également se reproduire de façon asexuée.
De toutes les plantes modernes, les bryophytes sont celles qui possèdent les sporophytes les plus petits (la partie de la plante qui est diploïde et qui constitue l'essentiel de la plupart des autres types de plantes). Ils possèdent des plastes (donc sont capables de photosynthèse) et sont généralement incapables de vie autonome, ils restent accrochés à leur gamétophyte maternel, qui fournit les nutriments.
Par exemple, chez les mousses communes qui nous sont familières, le tapis vert est le gamétophyte, haploïde et sont les "feuilles" n'ont parfois qu'une cellule d'épaisseur, et les petites tiges surmontées d'une capsule, qui grimpent en hauteur pour libérer leurs spores, sont les sporophytes, diploïdes.
Ces spores donnent naissance à des gamétophytes mâles ou femelles, et produisent des "tapis de mousse" mâles ou femelles. Les "tapis de mousse" mâles émettent des spermatozoïdes qui ont besoin de se déplacer dans une mince couche d'eau pour rejoindre et féconder l'oosphère des "tapis de mousse" femelles. Après fécondation, une nouvelle tige à spore est créée et le cycle continue.
Grâce au vent et à la légèreté de leurs spores, les bryophytes peuvent se disséminer sur toute la planète. Certaines espèces entrent en symbiose avec des bactéries. D'autres encore peuvent coloniser des milieux extrêmes en tolérant une déshydratation presque complète pour se réhydrater quand de l'eau devient disponible.
Les mousses du genre Sphagnum (sphaignes) constituent souvent une part importante des dépôts de matière organique à demi décomposée qui forment la tourbe.
LES FOUGÈRES ET D'AUTRES VASCULAIRES SANS GRAINES ONT ÉTÉ LES PREMIERS VÉGÉTAUX DE GRANDE TAILLE
Les bryophytes ont dominé le monde végétal pendant les premières dizaines de millions d'années de l'existence des plantes, mais aujourd’hui, ce sont les vasculaires qui dominent. Leurs plus anciens fossiles remontent à 425 millions d'années.
Comme c'est le cas pour les bryophytes, les spermatozoïdes des fougères et des autres grandes vasculaires sans graines doivent "nager" dans une mince couche d'eau pour atteindre les oosphères. Ces plantes sont donc dépendantes des milieux humides.
- Chez les vasculaires modernes, les sporophytes prédominent dans les cycles de développement ; c'est la partie de la plante la plus volumineuse.
- Les vasculaires ont deux types de tissus conducteurs : le xylème, qui assure la majeure partie du transport de l'eau et des minéraux, et le phloème, qui distribue les monosaccharides, les acides aminés et d'autres produits organiques de leur lieu de production dans la plante à leur lieu d'utilisation. Le xylème est généralement constitué de cellules lignifiées, donc solides et pouvant résister à la gravité. Cette capacité d'atteindre une grande taille a donné aux plantes vasculaires un avantage évolutionnaire : meilleur accès à la lumière, meilleure dispersion des spores... Ce processus a mené aux premières forêts il y a 385 millions d'années.
- Les racines sont des organes qui absorbent l'eau et les nutriments provenant du sol. Elles permettent aussi de fixer solidement en place des plantes qui peuvent maintenant atteindre de grandes tailles. Il semblerait que les racines ont été sujettes à un phénomène d'évolution convergente dans plusieurs lignées.
- Les feuilles sont le principal organe photosynthétique des vasculaires. Les microphylles (410 MA), aux petites feuilles en forme d'aiguille, précèdent les mégaphyles (370 MA), aux feuilles larges et ramifiées.
Je passe sur les détails de la vie sexuelle de ces plantes vasculaires sans graine. Disons simplement que la plupart des espèces sont homosporées (elles ont un seul type de spore qui donne un gamétophyte bisexué).
Panorama rapide de la diversité des vasculaires sans graines :
- Les lycophytes sont généralement des plantes tropicales épiphytes (c'est-à-dire qu'elles utilisent un autre organisme comme substrat, sans que cela relève du parasitisme) qui croissent sur des arbres. D'autres espèces vivent sur le sol des forêts tempérées. Durant le Carbonifère, cette lignée comprenait aussi bien des plantes minuscules que des géantes dépassant les 40m. Leur diversité a régressé lorsque le climat s'est refroidi. Il en existe aujourd'hui 1200 espèces.
- Les monilophytes :
- Les fougères sont bien connues. Certaines peuvent produire plus d'un billion (un million de million) de spores au cours de leur vie. Il en existe plus de 12000 espèces aujourd'hui. Ce sont les vasculaires sans graines les plus répandues.
- Les prêles. Fun fact : les prêles des champs sont comestibles (d'autre espèces sont toxiques), ça ressemble à des asperges riches en silice. C'est leur tige à spores qu'on mange, pas les feuilles, qui servaient autrefois à aiguiser des lames, car elles sont aussi riches en silice. J'ai quelques bons souvenirs de récoltes de prêles sauvages. Au carbonifère, elles pouvaient atteindre 15m. Aujourd'hui, il n'y en a plus qu'une quinzaine d'espèces, qui vivent en milieu humide.
- Les psilotes et autres restent des plantes dépourvues de racines.
Les ancêtres de ces plantes modernes ont formé les premières forêts. Elles ont contribué à l'importante diminution de la concentration en CO2 survenue durant le Carbonifère, qui a entrainé un refroidissement global, puis la formation de glaciers très étendus. Les racines des vasculaires sécrètent des acides qui dégradent les roches, ce qui accélère la libération du calcium et du magnésium dans le sol, deux minéraux qui réagissent au contact du CO2 dissous dans l'eau de pluie et forment divers composés stables et à terme s'intègrent aux roches.
Ce sont également ces forêts qui, avec le temps, se sont transformées en tourbe, elle même s'étant transformée en charbon au fil des millions d'années. Ce carbone des forêts des premières plantes vasculaires retourne donc aujourd’hui dans l'atmosphère.