Première fois que je lis Colette, dont on m'a dit beaucoup de bien. Je suis d'avis mitigé. Dès le début, je n'ai pas pu m'empêcher de lire en diagonale : c'est léger, c'est familier. J'ai pensé à Françoise Sagan, par ce format court qui explore des petits drames relationnels, mais Sagan est plus cynique, distante, ça me plait mieux. J'ai pensé à Nana de Zola, où on trouve des thèmes similaires avec une brillance si supérieure.
L'Ingénue libertine a un sujet qui devient progressivement clair, limpide : la satisfaction sexuelle. Ou plutôt l'insatisfaction. Dans la première partie, Minne est adolescente et, comme une madame Bovary précoce, rêve d'aventures amoureuses, de jolis brigands qui lui feraient vivre des trucs dingues, etc. Je m'attendais à une chute osée, à ce que cette gamine ait une exploration précoce de la sexualité, mais non, ça reste gentillet — et pas très passionnant, malgré quelques passages plus marrants ou elle titille de façon instinctive son cousin plus âgé.
Dans une seconde partie, Minne est mariée à ce même cousin. Elle recherche toujours l'aventure, mais cette fois plus d'ambiguïté : c'est l'aventure sexuelle. Diable, quel homme parviendra enfin à lui donner du plaisir ? Certainement pas ce petit baron niais qui tombe bêtement amoureux d'elle. Elle va donc de coucherie en coucherie. La communication au sein du couple est extrêmement médiocre, et Minne semble — malgré une forte indépendance émotionnelle — n'exister qu'à travers les hommes, l'intérêt qu'ils lui portent, le plaisir qu'ils pourraient lui donner. Mon intérêt à moi a été fluctuant, de soupirs ennuyés à éclairs de volupté littéraire. Je pense notamment à cet excellent passage où Minne trouve enfin, chez un homme plus mature et empathique, un mâle qui ne la traite pas juste comme cible sexuelle mais choisit volontairement de renoncer à son désir par amitié. Qu'on se rassure : à la fin, elle trouve enfin du plaisir avec son mari. Ouf.
Moment anecdote. Je repense à une fille que je connaissais, il y a longtemps. Extrêmement belle, intelligente, charismatique, sociable, extravertie, etc. On aurait pu la jeter dans n'importe quel contexte et dix minutes plus tard elle aurait fait connaissance avec plein de gens dont je ne sais combien d'hommes qui se disputeraient ses faveurs. Eh bien, ce modèle de force féminine, possédant naturellement influence et pouvoir, cherchait désespérément un homme qui, je cite, lui ferait vivre des choses dingues. Des aventures. J'insiste sur le lui ferait vivre. Je m'en souviens encore : elle, flamboyante, mille fois plus prédisposée à conquérir le monde que le marginal que j'étais, cherchait l'aventure et la satisfaction via les hommes. Je me demande si ça lui est passé.
J'ai moi aussi été déçue par L'Ingénue libertine, un de ses romans les moins subversifs (malgré le titre). Claudine à l'école (malgré le titre) est en revanche très croustillant. Je te le conseille si tu veux retenter l'expérience Colette !
RépondreSupprimerOui je me souviens de ton conseil, mais j'ai juste pris ce que j'avais sous la main à la maison pour l'instant ! J'ai aussi L'Entrave et La Vagabonde.
SupprimerCe sont des romans datés, mais éclairants pour qui s'intéresse à la figure de Colette. La Vagabonde la montre très indépendante, L'Entrave (la suite) carrément anti-féministe. Ça fait un peu mal.
RépondreSupprimerEh bien je me laisserai peut-être tenter, curieux de voir cet anti-féminisme. Mais j'essaierai de lire Claudine à l'école aussi pour équilibrer ;)
SupprimerJ'en étais sûre !
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