Avant d'aborder Le joueur, il est intéressant de savoir dans quelles circonstances Dostoïevski a écrit le roman. Pressé par son éditeur, le romancier a du livrer le manuscrit après seulement 27 jours de travail ! Certes, le récit trottait sans doute depuis un certain temps dans sa tête, mais cela explique notamment sa taille relativement modeste comparé à ses autres œuvres les plus connues.
Comme il est facile de le deviner, le sujet principal du roman est le jeu. Le jeu d'argent, pour être précis. On pourrait donc croire que le joueur, qui nous narre ses aventures à la première personne, est dès le début de l'histoire au cœur des casinos. Ce n'est pas le cas : pendant la majeure partie du roman, si le jeu est bien présent, le narrateur n'a pas encore sombré. Le joueur est un jeune homme intelligent, qui occupe le poste de précepteur dans une famille russe de passage dans une ville d'eau allemande. Il y a le colonel, homme d'age mur ruiné, amoureux de la belle Blanche, femme qui aime malheureusement les hommes proportionnellement à leur portefeuille, Des Grieux, un français qui semble avoir une grande influence sur le colonel, Mr Astley, un riche anglais timide et généreux, la grand mère, fortunée et puissante en plus d'avoir un sacré caractère ... Et il y a Pauline, qui entretient une relation destructrice avec le joueur. Lui est follement amoureux, et elle s'en moque, ce qui génère un rapport de domination qui ne mènera pas vraiment à de bonnes choses.
Je ne connais pas encore assez bien Dostoïevski pour savoir si c'est courant dans son œuvre, mais il est indéniable que si Le joueur est un roman dramatique, il ne manque pas non plus d'humour. Le narrateur prend plaisir à semer un certain chaos autour de lui, à créer la confusion, vexé qu'il est ne pas comprendre toute les subtilités des relations entre les différents protagonistes qui l'entourent, et il en ressort nombre de situations comique. La grand mère elle aussi provoque bien des sourires, tant sa personnalité est extravagante et sans gène. Puis les choses commencent vraiment à se gâter. L'argent est au cœur de tout, puisque c'est son manque qui est la cause du malheurs des uns et des obsessions des autres, et bien sur, c'est elle qui pousse à jouer. Le joueur va jouer, et il va gagner. Il va dilapider ses gains de façon futile, puis il retournera jouer. Et il n’arrêtera jamais. On connaissait la fin depuis le début, simplement en découvrant le tire du livre. Pouvait-il en être autrement ? On retiendra notamment les excellentes descriptions des parties de roulettes, qui profitent de l'expérience de Dostoïevski sur la question.
Le joueur est un roman court, bien construit et écrit avec talent, qui mêle avec réussite l'humour et le drame. C'est fou ce qu'on peut faire en 27 jours quand on est un écrivain de génie !
215 pages, 1865, Le livre de poche
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