Lovecraft est un écrivain assez unique, car sa création ne se résume pas à ses nombreuses nouvelles. Si son nom est devenu un adjectif, ce n'est pas pour rien : il a crée une ambiance, un univers, dans lequel l'homme n'est qu'une ombre passagère sur la terre, qui ne doit sa survie qu'au sommeil des forces antiques qui, tapies dans l’ombre, attendent leur heure. Sachant que son œuvre a toujours une influence énorme dans certains genres de musique, de cinéma, de littérature ou de jeu vidéo, il n'est pas étonnant que de nombreux écrivains aient pris possession de son univers pour le développer et y faire naitre leurs propres histoires. Ce sont donc ces nouvelles d'auteurs admirateurs et/ou amis de Lovecraft que nous propose ce premier tome des Légendes du mythe de Cthulhu.
- Le premier texte est l'Appel de Cthulhu (1928), un grand classique de Lovecraft, assez adapté pour découvrir l'auteur. Comme souvent, c'est un personnage qui raconte ses horribles découvertes, son passage du scepticisme à la compréhension et au traumatisme que la vérité provoque. C'est l'occasion de faire connaissance avec Cthulhu, le plus célèbre des Grands Anciens. Un texte fondateur qui fait toujours son petit effet.
- Suivent deux nouvelles de Clark Ashon Smith. La première, Talion (1931), est le récit à la première personne d'un homme qui est engagé comme secrétaire par un vieillard amateur de magie noire. Le vieil homme semble avoir très peur de quelque chose qui se ballade dans sa maison ... La seconde nouvelle, Ubbo-Sathla (1933), raconte l'aventure d'un curieux qui se retrouve en possession d'une pierre qui a le pouvoir de faire voyager l'esprit jusqu’à l'aube des temps. Deux textes sympathiques, le premier à mon sens plus que le second.
- La nouvelle suivante est de Robert E. Howard, créateur entre autres de Conan et de Solomon Kane. La pierre noire (1931) nous transporte dans un coin reculé d’Europe de l'est où un héros un peu trop curieux va être confronté à un étrange et effrayant culte ... Encore un texte très efficace.
- Les deux nouvelles suivantes sont de Frank Belknap Long. Dans Les chiens de Tindalos (1929), un homme décide de s'aider d'une drogue pour explorer une nouvelle dimension qui lui apportera une connaissance surhumaine et le fera sortir du temps. Mais quelque chose l'a suivit à son retour ... Une nouvelle très intéressante, mais il me semble avoir lu une histoire de Lovecraft très semblable. Dans Les mangeuses d'espace (1928), deux amis, dont un écrivain de récits d'horreur en pleine crise stylistique, seuls dans leur maison, sont confrontés à un mal étrange. Un voisin ayant fait une atroce rencontre vient les voir, et ils seront alors servis en horreur. Ils poursuivront leur aventure dans la nuit noire, face à d'étranges créatures ... Une excellente nouvelle, dommage que la fin ne soit pas à la hauteur du développement.
- Ensuite, on a encore droit à un duo de nouvelles, cette fois écrites par August Derleth, qui est également l'auteur de la préface du recueil. L'habitant de l'ombre est un récit réussi : près d'un lac mystérieux, dans une forêt toute aussi mystérieuse, des rumeurs évoquent une mystérieuse (oui, encore) créature, et un savant décide d'aller habiter dans une cabane du coin pour en avoir le cœur net. Mais après quelques temps, il ne donne plus signe de vie, et deux compagnons vont enquêter sur place. Ce récit propose une mise en abime intéressante et très bien intégrée : les personnages se réfèrent aux écrits de Lovecraft pour tenter de comprendre les noirs mystères auxquels ils sont confrontés. En dehors de ça, si la nouvelle est certes très plaisante on lire, on commence à ressentir la répétition des codes du genre, qui poussent à des situations finalement assez semblables et à une surenchère dans les descriptions qui commence à se remarquer au bout de plusieurs nouvelles. Hélas, dans Au-delà du seuil (1941), cette tendance ne fait que s'accroitre, l'histoire reprenant en effet énormément d'aspects de la nouvelle précédente et s’effondrant sous un manque d'originalité flagrant.
- Heureusement, Le tueur stellaire, de Robert Bloch, conclut de façon admirable ce recueil. Un écrivain en quête de bizarre et d'étrange déniche un mystérieux livre, De Vermis Mysteriis, et décide pour le déchiffrer de faire appel à ... Lovecraft ! Son nom n'est pas évoqué, mais on comprend bien que c'est lui qui se cache derrière ce "rêveur mystique" de Providence. Une nouvelle courte mais très réussie.
Pour conclure, je dirai que ce premier tome de Légendes du mythe de Cthulhu passe par des hauts et des bas, mais reste une lecture très plaisante pour les amateurs de Lovecraft. Cependant, le récit lovecraftien a tendance à se nourrir de codes et d'un style très définis, ce qui crée une certaine sensation de répétitivité, c'est pourquoi je vais faire une petite pause littéraire avant d'attaquer le second tome.
253 pages, éditions Pocket
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