lundi 13 mai 2013

Le livre des crânes - Robert Silverberg



Sous cette couverture ignoble se cache un roman de Robert Silverberg qui, surprise, n'est pas de la SF. Si par exemple l'Oreille Interne relevait clairement du fantastique, ici la limite est plus floue, on est presque face face à roman de littérature générale.

Le livre des crânes prend la forme d'un parcours initiatique pour quatre étudiants d'une vingtaine d'années. Ils ont tous une personnalité bien marquée : il y a Eli, l’intellectuel juif complexé, Ned, le littéraire bisexuel un peu tordu, Timothy, le beau gosse fils de riche, et Oliver, le campagnard orphelin arrivé à la fac à force de motivation et de travail. Et, chose intéressante, le récit se découpe en chapitres narrés alternativement par chacun de ces quatre personnages, on a donc une appréciable diversité de points de vue. Tout commence comme dans un road movie : cette joyeuse compagnie s’apprète à traverser les USA en voiture. Sauf que leur objectif, loin d’être commun, est ni plus ni moins que de partir en quête de l'immortalité. Eli, qui s'y connait en langues anciennes, a débusqué dans un recoin perdu de la bibliothèque de la fac un certain Livre des Crânes, et après l'avoir traduit, comprend qu'il évoque un monastère isolé dont les moines gardent le secret de l'immortalité. Cependant, ce serait trop facile s'il n'y avait pas un aspect critique : les candidats doivent être quatre, l'un devra quitter volontairement les autres (se suicider ?), et un second devra être tué de la main des deux qui auront accès à l'immortalité. Et, y croyant seulement à moitié, les quatre jeunes hommes partent en quête de la vie éternelle, en évitant de parler de ce qu'ils feront si jamais il s'avère que le Livre des Crânes dit vrai ...

Tout l’intérêt du récit vient des différentes personnalités des protagonistes et de leurs relations, que l'on comprend progressivement à l'aide de nombreux retours en arrière. Et c'est l'occasion de voir que comme souvent chez Silverberg, le sexualité tient une place capitale dans la vie des personnages. Ces derniers sont complexes et torturés, cachent de sombres secrets, et jusqu'au bout on se sait pas qui sont les forts et qui sont les faibles, qui trouvera la force de vivre et qui ne la trouvera pas. On est plongé dans leurs esprits détraqués, c'est un régal. 

Dans Le livre des crânes, Silverberg mène jusqu'au bout la quête initiatique de ses personnages et les force à se regarder en face, quitte à ce qu'ils ne puissent pas le supporter. C'est la confrontation de l'homme avec lui même, le combat pour l'acceptation de soi. Encore un chef-d’œuvre de Robert Silverberg, l'un de ses meilleurs à mon sens avec Les monades urbaines.

352 pages, 1972, le livre de poche

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